Ardéchois de naissance, Aurel est dessinateur reporter et auteur de BD. Il se lance dans l’expérience cinématographique avec un premier court métrage d’animation en 2011, Octobre Noir, qui relate les événements tragiques de la soirée du 17 octobre 1961 où 300 manifestants algériens furent tués à Paris par la police française. Accompagné de Jean-Louis Milesi, le scénariste de Guédiguian, il poursuit l’aventure. Josep est son premier long métrage, un récit qui évoque à la fois l’épisode de la Retirada (fuite massive des Républicains suite à la victoire de Franco), et le sort du détenu Josep Bartoli, voué à devenir un artiste de renom.

Un brin didactique, ce récit se distille sur plusieurs temporalités, et à chacune Aurel attribue un style graphique spécifique. Comme fil conducteur, la narration d’un personnage imaginaire, ancien gendarme, aujourd’hui en fin de vie, et qui porte en lui les remords d’une nation. Cet homme, gardien de camp, noue une amitié avec Josep Bartoli, chacun de son côté des barbelés, et il évoque ses souvenirs auprès de son petit-fils, dans un style animé plutôt classique. Quand l’image vient illustrer la vie de Josep, alors elle se fait statique, ou du moins animé à minima, avec des silhouettes qui se succèdent à elles-mêmes aux différentes étapes du mouvement, mettant en valeur le dessin d’Aurel, telles des esquisses, à la plume et à l’aquarelle. Des dessins de Josep trouvent leur place dans cet ensemble, esquisses croquées sur le vif dans les camps français ou réalisés par la suite. Du dessin, dans du dessin, dans du dessin…

On met quelque temps à s’habituer à ce mélange, puis on comprend que ce montage de styles fait partie du propos, et on se laisse emporter.

Josep Bartoli s’émancipa de ses traumatismes, sans doute grâce à son art. De l’Europe au Mexique en passant par New York, la vie de cet activiste fut riche de rencontres (celle avec Frida Kahlo est notamment évoquée) et d’engagements, politiques et artistiques. Peu connue, son œuvre mérite d’être découverte et ce film l’encourage.

Vérité et fiction se mêlent dans ce film hommage on ne peut plus réussi d’un dessinateur à un autre dessinateur !

Vous pouvez découvrir les dessins de Josep Bartoli, d’une force incroyable, dans l’ouvrage La Retirada : exode et exil des républicains d'Espagne de Laurence Garcia, contenant le témoignage et les photos de son neveu Georges Bartoli.

Caroline